Dimanche. Le dimanche à Bluebell était un jour assez particulier. En effet, dans cette petite ville de l’Alabama, la plupart des habitants se rendaient à l’église. Cela pouvait paraître très étrange voire même assez ringard pour certains, mais pour ceux qui habitaient la ville depuis toujours, pour ceux qui avaient encore des valeurs, cela était tout à fait normal. Aller à l’église le dimanche pour une heure ou deux était dans les traditions de Bluebell et des Bluebelliens. Mia n’y échappait pas. La famille Adsons, ou du moins ce qu’il en restait, c'est-à-dire les enfants et plus précisément les filles de la famille perpétuait les traditions. Mia avait toujours été un minimum croyante, et si pour la plupart des jeunes adultes de son âge, ça n’était pas forcément très courant, elle s’en fichait. L’opinion des autres n’avait jamais été importante pour elle, ou du moins, elle s’était vite habituée au fait que les gens parlent, disent des choses parfois méchantes à son sujet, et elle n’y faisait plus attention. Elle passait simplement pour une fille de bonne famille, ce qu’elle était. Elle avait ainsi réveillée ces deux sœurs, Ava et Sila pour se rendre jusqu’à l’église. La messe dura un peu plus d’une heure. Chaque fois, Mia croisait ses anciens amis, Maiwenn et la petite Lydia, amie de sa sœur. Les Grayson, les Andersson, les Roberts, toutes ces grandes familles de Bluebell qui se connaissaient au moins de nom se retrouvaient ici. Alors elle ne pouvait que les apercevoir. Cependant, elle ne leur parlait pas, se mélangeait pas vraiment à eux. Elle était surtout assez en froid avec les Grayson depuis l’histoire avec Aymeric… une longue histoire qui lui avait value de perdre les deux personnes – en dehors de sa famille – qui avaient toujours compté pour elle. Maiwenn et Aymeric, ses anciens meilleurs amis. Si l’histoire et la raison de leurs disputes étaient différentes, Mia se sentait coupable dans les deux. Les deux lui manquaient aussi terriblement, malheureusement, elle ne voyait pas comment elle pouvait arranger les choses. Aymeric avait toujours eu une place spéciale dans son cœur, même si elle n’avait jamais osé lui avouer. Elle avait été là pour lui, puis l’avait abandonné. Elle avait perdu tout espoir de le voir se réveiller un jour tandis que sa famille avait toujours cru au miracle. Miracle qui s’était produit. Bien trop tard pour Mia qui avait déjà refait sa vie. Avec celui que Maiwenn convoitait depuis un certain temps. Pas très classe, n’est-ce pas ? Pour sa défense, elle n’en savait rien, mais elle aurait du le sentir. Parce que Maiwenn était sa meilleure amie. Une fois l’heure passée, Sila, la jeune sœur de Mia s’adressa à elle : « Je pense qu’il est temps que tu ailles la voir » dit-elle en lançant un regard à Maiwenn, qui n’était pas sortie de l’église comme tous les autres. « Et moi je pense que tu penses un peu trop ! » répondit-elle à la petite brune avant d’ajouter : « Je vous rejoins à la maison.. » Après tout, Sila n’avait peut-être pas tord. Peut-être que c’était le moment ou jamais de tenter une approche. Les filles s’éclipsèrent, laissant Mia seule avec Maiwenn qui ne l’avait pas encore vu. Elle s’approcha doucement d’elle puis s’installa à côté d’elle sur le banc. Elle brisa le silence : « Salut… » Salut. Ok, c’était vraiment nul, mais elle ne voyait pas quoi dire d’autre pour le moment.

Mia se rappelait très bien l’enfance et l’adolescence qu’elle avait passée avec les jeunes Times-Grayson, et à vrai dire, il n’y avait que de Lydia qu’elle n’était pas forcément très proche. La petite dernière était plutôt de l’âge de Sila, de ce fait, elles étaient elles aussi meilleures amies. C’était ainsi que ça se passait à Bluebell, entre les familles. Les Adsons et les Grayson habitaient le même quartier et très vite, Mia s’était rapprochée de Maiwenn, puis ensuite d’Aymeric. Elle avait toujours considérer la jeune Maiwenn comme sa meilleure amie, celle avec qui elle faisait des bêtises certes, mais aussi celle qui était devenue au fil des années sa confidente. Les seules choses qu’elle ne lui avait pas dites concernait son frère… c’était trop bizarre. Aller dire à votre meilleure amie que vous avez embrassé son frère un soir, et qu’en plus vous avez aimé. Bref, elle avait gardé pour elle cette partie de leur histoire, même si elle avait eu envie de tout lui dire. Maiwenn et Mia partageaient tous leurs secrets, parfois même des secrets qu’elle n’avait pas dit à Jemima, qui était sa sœur et certainement la personne qui la connaissait le mieux dans ce monde si on ne comptait pas Maiwenn. Il était toujours très difficile pour Mia de ne pas parler à Maiwenn. Chaque dimanche, le même rituel. Elle savait qu’elle allait la croiser, qu’elle allait la regarder, voir si elle allait bien, et repartirait chez elle, heureuse d’avoir un instant pu voir celle qui fut sa meilleure amie. Pourtant aujourd’hui, c’était différent. Mia était bien décidée à crever l’abcès qui s’était formé entre les deux filles. Mia était prête à faire le premier pas, bien que ce ne soit pas son genre. La jeune Adsons ne manquait pas de caractère et se confondre en excuse comme ça, sans vraiment le penser, n’était pas trait de sa personnalité. Mia se demandait d’ailleurs souvent la raison profonde de cette dispute entre elles. Elle pensait d’abord qu’Aymeric était le problème, ou du moins, l’un des problèmes. Il est vrai que Mia avait fait une erreur en l’abandonnant, en croyant qu’il ne reviendrait jamais à la vie. Elle aurait du rester près de sa meilleure amie. Elle en avait besoin. Pourtant, Mia avait ressentie le besoin de s’échapper, de s’éloigner de la famille pour ne pas souffrir. Puis il s’était réveillé, contre toute-attente. Elle ne l’avait pas revue, mais de toute façon, il n’en avait certainement pas envie. Alors, si avec Aymeric, c’était fichu, Mia refusait de croire qu’avec Maiwenn, il en était de même. Leur amitié avait été trop belle, trop forte pour que tout soit gâché en quelques secondes. S’approcher d’elle, faire le premier pas. Elle était en train de le réaliser, mais elle ne s’attendait pas à la réaction de son amie. « Qu’est-ce que tu me veux Mia ? » Dans sa voix, elle comprit que Maiwenn était encore en colère contre elle. Mia soupira, prête à faire demi-tour, puis se raviva. Non, elle ne la lâcherait pas. Pas avant que toutes les deux aient une explication. « Savoir comment tu vas… j’ai appris pour Lydia et… » Peut-être que Maiwenn n’avait pas envie de parler de Lydia et de sa maladie. Après le coma d’Aymeric, ils devaient faire face à la maladie. « Excuse-moi, tu n’as surement pas envie de parler de ça avec moi » dit-elle, sans baisser le regard du visage de Maiwenn. En fait, elle ne savait pas quoi dire. Elle voulait d’abord savoir si Maiwenn était prête à l’écouter, avant de dire ce qu’elle avait à dire.