« Maman, je peux t’aider à cuisiner ? ». La petite Joyce-Amélie venait encore une fois de demander à sa mère si elle pouvait cuisinait avec elle. Bien sur à son âge, cuisinait ne voulait pas dire grand-chose, à part peut-être éplucher les pommes de terre ou préparer les ingrédients mais elle aimait ça. Son grand frère, Byron l’interrompit :
« Amélie, Jake est là, il t’attend à l’entrée ». Jake Grayson était le meilleur ami de la belle depuis presque toujours. Elle adorait passer du temps avec lui, ils s’amusaient beaucoup ensemble et faisaient également beaucoup de bêtises. D’ailleurs, dans le quartier de Bluebell, les deux amis étaient connus comme étant de vrais petits farceurs. Faut dire que Jake était très doué pour trouver des idées loufoques. Et puis, Joyce adorait le suivre dans ces combines.
« Finalement maman, je ferais à manger avec toi demain ! » fit-elle en souriant à celle qui lui avait donné la vie sept années plus tôt. Sa mère soupira et ria à son tour. Elle savait à quel point sa Joyce Amélie était proche de ce garçon, qui n’habitait pas très loin de chez eux.
« D’accord ma puce… Pas de bêtises vous deux ! ». Pas de bêtises. Joyce sourit à cette remarque et répondit encore une fois :
« Ne t’inquiètes pas, on sera sages ! ». Joyce vit le regard que sa mère lança à son frère Byron. Elle ne la croyait pas évidemment, mais ils étaient tellement mignons quand ils le voulaient. Et puis, empêcher de voir ces deux là relevé de l’impossible pour les Andersson comme pour les Grayson. Joyce sortit de la cuisine en courant, remerciant son frère au passage de l’avoir prévenue. Elle et Byron étaient les deux premiers de la fratrie des Andersson et s’entendaient à merveille. Il était son grand frère qu’elle adorait. Elle retrouva Jake qui l’attendait à l’entrée comme lui avait dit Byron et ils sortirent. Joyce avait promit à sa mère de ne pas faire de bêtises et pourtant, en entendant le chat des voisins miaulait dans leur jardin, elle eut une idée. Une idée très farfelue évidemment. C’est comme ça qu’ils se retrouvèrent pétards dans une main et Kit the Kat dans l’autre. Joyce détestait les chats et celui là ne faisait pas exception. Ils l’emmenèrent près de la colline, prêt à faire exploser le chat. Ce n’était pas par méchanceté, ce n’était juste qu’une petite expérience. Joyce voulait voir le chat s’envoler dans les airs. A cette époque là, la belle était un vrai petit diable et le duo qu’elle formait avec Jake n’arrangeait pas les choses. Leur plan avec Kit the Kat semblait exceptionnel sauf qu’ils avaient oubliés de l’attacher… le chat pouvait encore courir, à leur plus grand regret. Juste au moment où ils se cachaient pour assister au spectacle, le chat s’est enfui et s’est retrouvé où ? Devant la banque. Résultat : la banque qui explose, les clients qui sortent en courant, un vrai vacarme ! Joyce se retourna vers Jake et lui dit simplement :
« Oh oh… ».
24 décembre. Un repas de Noël comme les autres chez les Andersson. Tout le monde est présent autour de la table quand Joyce décide d’enfin leur parler :
« Je pars étudier à New-York. ». La belle ne leur laisse pas vraiment le choix. Ses parents la regardèrent, sans grand étonnement. Car même si Joyce Amélie adorait Bluebell et son petit cocon familial, elle aimait voyager. Elle était d’ailleurs allée plusieurs fois au Canada, pays d’origine de sa mère et avait adoré. Elle se justifia quand même, voyant sa sœur Lily faire un peu la tête. Elles étaient très proches toutes les deux, peut-être que Lily lui en voudrait de partir comme ça du jour au lendemain.
« New-York est la ville idéale pour moi étudier le droit ! L’université de New-York est très réputée, et je veux le meilleur enseignement qui soit. Vous savez à quel point je rêve d’être avocate, depuis toute petite. » Joyce avait toujours été très déterminée et obstinée. Quand elle voulait quelque chose, elle réussissait toujours à l’obtenir. Elle était aussi très perfectionniste d’où le fait qu’elle voulait le meilleur pour elle. Byron était là aussi, ainsi qu’Eleanor son autre petite sœur. Les deux avaient bien sur réagis à l’annonce de Joyce, mais ce fut la mère des enfants qui répliqua :
« Joyce Amélie chérie, pourquoi si loin, il y a aussi de très bonnes universités à Mobile. Et ce n’est qu’à moins de 20 km de Bluebell… ». Bien sur, la mère de Joyce n’était pas pour ce départ. Elle adorait ses enfants et auraient aimé les garder à Bluebell pour toujours. Comme toutes les mamans.
« Maman, je vais bientôt avoir 20 ans, je pense être assez grande pour m’éloigner un peu. Et puis, je reviendrais pour quelques week-ends et pour les anniversaires et Noël ». Joyce venait d’obtenir son diplôme de lycée. Elle attendait ce jour depuis tellement longtemps ! Le droit l’a toujours passionnée et devenir avocate avait toujours été son rêve. Elle se voyait mal tout abandonnée car sa mère avait peur pour elle. Puis de toute façon, sa décision était prise ; elle ne changerait pas d’avis. Et puis, comme elle l’avait dit, elle reviendrait quelques week-ends pour se retrouver en famille. Après ce repas passé, elle fit part de sa décision à Jake. Jake et elle étaient toujours très proches, et quand elle lui annonça qu’elle partait bientôt, il le prit très mal. Jake était important dans la vie de la brune, il était son meilleur ami, il avait été son premier amour. Elle ne pouvait oublier tous les moments passés avec lui alors le savoir fâché lui faisait beaucoup de mal. Pourtant, elle était quand même partie.
New-York. La ville qui ne dort jamais. Quelle vie extraordinaire. Joyce était aux anges depuis qu’elle était ici. Elle avait fait toutes ces études ici, et avait même décidé de s’y installer. A vrai dire, quand vous entrez dans une ville comme New-York, il était difficile d’imaginer retourner vivre à Bluebell, qui à côté, était un vrai trou paumé. Sa famille s’était douté qu’elle ne reviendrait pas. Mais ici, tout était tellement plus facile qu’à Bluebell. Joyce était maintenant avocate à son propre compte et avait déjà une belle réputation derrière elle. Elle avait réglé des affaires vraiment intenses qui l’avaient amenée au premier plan. Elle croulait d’ailleurs sous les propositions. Tout le monde voulait être défendu par la grande avocate Joyce Amélie Andersson, la fille de l’Alabama. Malheureusement, ce soir là, Joyce n’était pas au meilleur de sa forme. Il y a un an, elle avait fait une rencontre qui changea sa vie. Un homme, avocat lui aussi avec qui elle devait se fiancer dans peu de temps. Or, Joyce Amélie avait découvert le matin même qu’il l’avait trompé avec sa secrétaire. Et surtout, que ce n’était pas la première fois. Alors, quand Jake Grayson vint frapper à sa porte, elle lui demanda d’abord ce qu’il faisait ici à New-York, pour ensuite l’inviter à boire un verre. Puis deux, puis trois. Puis il l’arrêta lui disant qu’elle avait trop bu. Finalement, Joyce le supplia de l’emmener à son hôtel et ils passèrent une nouvelle nuit d’amour ensemble. Une nuit dont elle se souviendra toute sa vie. Il avait bien sur réussi à lui faire oublier ce mec qu’elle allait épouser mais elle ne pouvait pas.
« Écoute Jake … c’était sympa cette nuit, tu m’as remonté le moral mais, là j’dois filer. » Voila exactement les mots qu’elle lui avait dits. Ridicule. Elle se sentait ridicule mais elle ne pouvait pas faire autrement. Elle avait foiré avec lui le jour où elle avait quitté Bluebell pour les études. Elle sortit de la chambre, direction le travail. Encore et encore le travail. C’était sa seule raison de vivre.
Joyce Amélie retrouva sa meilleure amie dans un café. Everleigh l’avait beaucoup aidé quand elle était arrivée à New-York dix ans plus tôt. Les deux filles avaient toutes deux étudiées à l’université de la ville mais avaient prises des voix différentes. Elles se retrouvaient très souvent pour parler. Et aujourd’hui, Joyce avait vraiment besoin d’une amie à qui se confier.
« Joyce, ma belle, comment tu vas ? J’ai appris pour Bryan, je suis désolée. ». Bryan était ce fameux futur fiancé. Enfin ex pour le coup.
« Ca va merci, et toi alors ? ». Elles parlèrent quelques minutes avant que Joyce ne lui coupe la parole :
« Ecoute Everleigh, faut vraiment que je te dise quelque chose. J’en ai encore parlé à personne… ». Everleigh la regarda d’un air étonné, prête à écouter son amie.
« Je suis enceinte… de trois mois. Et avant que tu me le demandes, le père n’est pas Bryan, c’est Jake ». Jake. Comment avait pu t’elle en arriver là ? Elle était enceinte d’un homme qu’elle n’était même pas sure de revoir un jour.
« Félicitations quand même Joyce. Mais, tu lui as dis ? » Non, elle ne lui avait pas dit et elle ne comptait pas le faire.
« Non… ça ne sert à rien ! Jake déteste la ville, il déteste New-York. Il ne voudra jamais venir vivre ici avec moi. Et puis, on ne sera jamais ensemble… ». Dommage parce qu’il aurait fait un bon père, Joyce en était persuadée.
« Qu’est-ce que tu vas faire ? ».
« Le garder bien sur. Je ne serais pas la première mère célibataire de l’histoire ! ». Everleigh sourit à cette remarque. Quoique les gens en disent, quoique les gens en pensent, elle aurait cet enfant. Elle venait d’avoir 26 ans, elle était prête à avoir un enfant. Elle n’était juste pas prête à dire la vérité concernant le père du bébé. Son petit garçon, oui parce qu’elle était sure d’avoir un garçon, n’aurait pas de père et c’était mieux ainsi.
Joyce Amélie ne travaillait pas aujourd’hui. Elle avait une journée plutôt tranquille qu’elle avait décidé de passer avec son fils de presque deux ans, Caleb. Caleb Andersson, fils de Joyce Amélie Andersson. Joyce s’assied sur le canapé regardant son fils qui apprenait à marcher. Le petit blond essayait de se relever tout seule mais sans succès. Joyce s’approcha de lui en souriant :
« Mon chéri, tu es encore trop petit pour te lever tout seul. Viens avec maman. » Elle la prit dans ses bras pour lui faire un câlin. Son fils était toute sa vie. Autrefois, Joyce n’aurait jamais pensé avoir un enfant, du moins pas toute seule, mais elle ne regrettait pas sa décision. Caleb comblait sa vie de bonheur depuis près de trois ans. Il était sa petite merveille comme elle le disait souvent. La réaction de son entourage fut très différente selon les personnes, mais dans l’ensemble, sa famille l’avait bien accepté. Tout le monde adorait le petit, qui était vraiment à croquer. Le téléphone de la maison sonna, interrompant Joyce. Elle se dépêcha de répondre :
« Allô, oh Byron c’est toi. ». C’était le frère de la demoiselle.
« Quoi ? Qu’est-ce que tu racontes, c’est pas possible ?! ». Joyce Amélie s’assied de nouveau sur le canapé, son fils sur ces genoux.
« Je serais là dans deux jours […] D’accord, à plus tard Byron. ». Byron venait d’annoncer une terrible nouvelle à sa sœur. La mère des Andersson venait de mourir d’une crise cardiaque. Joyce n’en revenait pas. Elle serra son fort contre elle. Elle en avait le souffle coupé. Cette nouvelle venait de la bouleverser. Joyce avait du mal à réaliser qu’elle ne reverrait plus jamais sa mère. Elle avait envie de crier, de pleurer mais n’en fit rien. En fait, elle ne pouvait plus rien dire. Plus aucun mot ne sortait de sa bouche. Le choc, tout simplement. Elle se leva, puis se rendit directement dans sa chambre. Elle sortit ses valises qu’elle ne pensait pas réutilisé un jour et commença à y mettre ses affaires. Elle mit aussi les affaires de Caleb.
« C’est parti mon beau, on rentre… ». Elle retournerait à Bluebell pour l’enterrement de sa mère. Elle resterait là-bas un moment pour son père et pour ses sœurs. Et pour le reste ? Elle aviserait une fois sur place.
Un an. Cela faisait un an que la mère des Andersson les avait quittées, mais pas que. Un an aussi qu’Amélie était revenue à Bluebell et avait retrouvé sa famille. Son père, son frère et ses sœurs. Perdre sa mère avait été une rude épreuve pour la famille Andersson et pour Amélie qui avait toujours été très proche d’elle. Cela avait cependant été comme un déclic pour la jolie brune : vivre loin des siens demeurait impossible. Elle ne voulait pas les perdre un par un, se rendant compte qu’elle n’avait passé que très peu de temps avec eux ces dernières années. Dix ans loin de la ville, ce n’était pas rien. Comme chaque matin, elle se leva de son lit – qu’elle partageait depuis quelques mois avec celui qu’elle considérait simplement comme l’homme de sa vie – et alla embrasser Caleb qui dormait dans la chambre d’à côté. Caleb avait eu trois ans, autant dire qu’il avait grandi à une vitesse incroyable. Puis elle revint dans le salon de leur belle maison, celle qu’ils avaient achetée il y a des semaines maintenant pour leur jolie petite famille. Puis elle se planta devant une photo, qu’elle avait soigneusement placée dans un cadre. Dessus ? Son père, sa mère, Byron, Eleanor, Lily et elle. Tous réunis. Comme avant. Elle resta quelques secondes à la regarder, essayant de se souvenir de la dernière fois où ils avaient été tous ensemble, tandis que deux bras l’attrapèrent dans son dos. Elle sentie la respiration de Jake dans son cou tandis qu’il lui déposa un baiser sur la joue.
« Je suis sure que ta mère serait très fière de toi bébé » Il n’avait pas tord. Elle savait qu’il avait raison. Sa mère serait heureuse de savoir qu’elle et Jake étaient enfin ensemble, que Caleb allait bien, que tout était parfait pour elle en ce moment.
« Ouai.. elle me manque vraiment » dit-elle en lâchant un petit sourire, puis elle se retourna pour l’embrasser. Bien sur qu’elle lui manquait, ce serait inhumain si ce n’était pas le cas. Et elle savait qu’elle manquait à tout le monde. A Byron, à Eleanor, même si cette dernière avait été en froid avec elle avant sa mort, à Lily.
« Je regrette juste que Caleb n’ait pas eu le temps de la connaitre réellement.. heureusement, ta mère est encore là, et je suis sure qu’il va l’adorer » Caleb avait rencontré la famille Grayson évidemment, mais il était encore dans sa phase de connaissance avec eux. Après tout, on lui ajouté des grands parents et des tantes à celles qu’il avait déjà, c’était compliqué.
« Oui ! D’ailleurs, il est l’heure du réveil pour lui, on doit être chez moi dans une heure » annonça Jake avant d’embrasser une dernière fois Amélie et de se diriger vers la chambre du petit. Caleb et Jake allaient passer du temps chez les Grayson, tandis que la belle allait travailler. Tout semble parfait pour cette petite famille, pour combien de temps encore ?